Conséquence évidente du succès d'un genre à part, l'apparition de titres essayant de profiter du courant ascendant est souvent l'occasion de pester contre une industrie qui ne cherche même plus le renouveau mais se contente de piquer les idées d'autrui.
Mais il arrive aussi que l'inspiration puisée à la source permette d'apprécier une idée d'un œil neuf et lui apporte une fraicheur nécessaire à son épanouissement. En effet, si Michel-Ange a été le précurseur du baroque, Rembrandt en a été une figure tout aussi emblématique. Et c'est exactement le phénomène que l'on observe entre FromSoftware le précurseur du Souls-Like et Deck13 à qui l'on doit déjà le décrié Lords of the Fallen, qui peut faire figure de test pour le studio, et le ci-présent The Surge, qui bénéficie donc d'une certaine expérience.
L'idée d'un Dark Souls dans un monde futuriste, crée par une équipe occidentale était, rien que dans l'intitulé, déjà très alléchante. Les mécaniques du gameplay d'origine étant parfaites, leur associer un environnement nouveau et donc une ambiance diamétralement différente, voilà de quoi apporter la fameuse fraîcheur à laquelle je faisais allusion plus haut.
Nul besoin de faire planer un suspens de bas niveau plus longtemps, The Surge est un excellent jeu, n'en déplaise aux extrémistes. Ce schisme "Souliesque" apporte son lot de bonnes idées et le studio allemand nous gratifie d'un titre aux petits oignons, certes perfectible, mais diablement entraînant, et aussi éprouvant que son cousin japonais.
Au rayon des éléments empruntés, on retrouve évidemment la difficulté, ou plutôt la rigueur nécessaire à la progression dans un dédale mécanique, et la punitivité globale qui ne fera aucun cadeau lorsque le joueur croira avoir gagné quelques instants de répit. Chaque mort se solde par la perte des "scraps", éléments qui permettent d'augmenter la puissance du noyau de l'exosquelette afin de s'accoler des améliorations plus nombreuses et plus puissantes, ainsi que d'améliorer les armes et les différentes pièces de vos armures. Récupérer ses "scraps" se fera ici aussi au prix d'un parcours sans faute vers le lieu de votre trépas précédent, mais cette fois tout sera minuté ! 2:30 pour retourner sur place, mais cet élément n'est la plupart du temps qu'un artifice pour faire monter la pression car tuer les ennemis croisés permet de remplir à nouveau le chronomètre, et si les environnements sont de vrais labyrinthes, ils sont également assez intuitifs pour que l'on s'y retrouve rapidement.
La direction artistique et la conception des niveaux sont également inspirés des Souls, car extrêmement bien construits, et d'une logique implacable. L'ouverture des raccourcis, et, petite nouveauté, l'obligation de refaire certains niveaux qui se révèlent comme centraux pour tout le jeu, permettent d'apprécier au plus haut point la qualité du travail fourni.
Les combats, élément attendu au tournant, ne bénéficient certes pas du détail peaufiné à l'extrême des titres de FromSoftware, on notera par exemple que les hitboxes sont beaucoup moins fines, mais ils gagnent en nervosité, et certains duels sont au moins aussi exigeants que des rencontres impromptues avec des chevaliers noirs. Les compétences sur le terrain dépendent à la fois du niveau du joueur pour chaque type d'arme (à une main, à deux mains, riveté à l'exosquelette, bâton...) qui augmente au fur et à mesure de l'utilisation, ainsi que du niveau d'amélioration (de 1 à 5 en NewGame) que le joueur installera en récupérant des pièces détachées, gagnées en démembrant les ennemis. Un élément original des combats est d'ailleurs le fait de pouvoir cibler divers éléments de chaque ennemi : tête, corps, bras, arme, ou jambe. L'intérêt ? A chaque pièce coupée, ses pièces détachées, et donc de quoi améliorer telle ou telle partie de l'armure.
Là où The Surge se démarque également, c'est au niveau de son scénario et de son lore, et de la manière dont ils sont présentés. La narration est ici claire et posée. On sait qui on est, on sait où l'on va, on identifie clairement les protagonistes. On est donc loin de l'ambiance ténébreuse et mystico-gothique d'un Souls.
Un petit mot sur le DLC, intitulé sobrement "A Walk in the Park", il rappelle furieusement Westworld ou Jurassic Park car en transposant le scénario du jeu de base dans un parc d'attractions, on se retrouve avec des mascottes qui cherchent à trancher en fines lamelles le moindre bout de chair fraiche. Ce DLC permet également de changer de décor et d'ambiance, et s'il est un peu court, il est aussi très plaisant à arpenter et recèle de bonnes idées.
Pour conclure ce pavé, j'ajouterais simplement que The Surge a hélas payé les pots cassés d'une première expérience mitigée du studio, et souffre aussi du fait que les Souls demeurent des jeux de niche, réservés aux joueurs avertis. En ne bénéficiant pas de la visibilité accordée à un titre aussi grandiose qu'un Bloodborne, il était évident que le succès commercial ne serait pas au rendez-vous, et c'est très dommageable. Voilà un jeu qui mérite d'être connu et reconnu.