Il y a des jeux géniaux, mais qui suivent des schémas connus. Ils n'en demeurent pas moins exceptionnels. Et puis il y a les jeux grandioses, qui ne paient pas de mine au premier abord mais qui grâce à un savant dosage de prises de risques, se hissent au rang des titres qui restent gravés dans les mémoires.
Outer Wilds appartient à cette catégorie.
Dans la peau d'un extra-terrestre à 4 yeux dont le charisme ferait presque de l'ombre à Abe (d'Oddworld !), nous voilà donc partis explorer un système solaire, à bord d'une navette spatiale en... bois ? Eh oui. Son look rétro qui rappelle indubitablement les LEM des missions Appolo, et sa décoration rustique deviendront bien vite synonymes de sécurité tant les cieux vont se révéler hostiles.
Dans l'espace, personne ne vous entend crier. Par excellence le milieu le plus inhospitalier à la vie, l'espace sera à la fois un terrain de jeu et un terrain miné. Le revers de la médaille quand on est un explorateur, c'est qu'on est souvent seul, à poil en milieu hostile, et que nul ne peut nous aider. Ici, point d'ennemis, de conquérants cosmiques ou de pirates stellaires, mais des environnements qui, sous leurs atours étoilés, peuvent se révéler fatals au moindre faux pas.
Mais Outer Wilds n'est pas qu'un bête jeu d'exploration. Passé un tutoriel peu aguicheur, que faire une fois l'atmosphère de notre planète enfin loin derrière nous ? C'est là que le coeur du jeu entre en scène. Car rien ou presque ne va mettre l'explorateur sur le bon chemin, tout simplement car il n'y a a de bon chemin. Les premières heures seront propices à vagabonder aux quatres vents solaires, à essayer d'apprivoiser ce satané vaisseau, et à s'ébahir devant de superbe trouvailles visuelles et architecturales.
Mais, et c'est là mon principal reproche envers le titre, il est affreusement difficile de mettre le pied à l'étrier sans un petit coup de pouce. Car hormis trouver des bribes de texte émanant d'une race disparue et dont on ne sait trop que faire... On sera bien vite perdus dans l'immensité (relative) du système solaire. J'en profite pour conseiller vivement le WalkTrough de Polygon, très bien fait, et essentiel pour démarrer le jeu comme il se doit. Si comme moi vous avez débuté sans rien savoir de Outer Wilds, cela vous sera bien utile.
Bref, une fois que l'on a vraiment démarré l'aventure, c'est l'extase. On se prend au jeu de l'archéologue, et surtout, à celui du découvreur de ruines et de technologies qui parsèment chaque planète, astéroïde, station spatiale. Une fois que l'on sait enfin piloter avec précision, c'est tout un monde qui s'ouvre à nous, et c'est un plaisir sans cesse renouvelé que de comprendre comment fonctionne chaque astre visité. Les satellites jumeaux, dont l'un aspire le sable situé sur l'autre. La cité à l'envers et le trou noir en son centre. La planète quantique qui disparait dès que l'on détourne le regard... Je n'en dis pas plus car il est génial de découvrir par soi même cet univers.
Bien sur, toute l'exploration repose sur des enjeux, révélés assez tôt, et de manière totalement explosive et innatendue. S'ensuit alors une épopée à travers les étoiles pour répondre aux questions soulevées par le jeu.
Outer Wilds se vit plus que tout autre titre. Il propose des principes et des concepts qu'il fallait oser implémenter dans un jeu vidéo, et c'est fait ici d'une manière particulièrement intelligente. En parler est ô combien difficile car la poésie qui en émane, au travers d'une bande-son simple mais parfaite, ainsi qu'avec la direction artistique inspirée, et les sous-textes mélancoliques, font de ce jeu une oeuvre à part.
Il n'est pas exempt de légers défauts, comme son scénario qui semble nous abandonner; ou bien son gameplay un peu daté. On a par exemple l'impression de marcher sur un rail, et lorsqu'une marche d'escalier devient un obstacle franchissable uniquement avec son jet-pack, c'est un poil frustrant. Sur le plan technique, on est là aussi loin des standards modernes. Mais cela est largement compensé, je l'ai déjà dit, par une direction artistique exemplaire.
J'ai découvert ce jeu grâce à Game Next Door, dont je conseille vivement les vidéos, toujours très documentées et critiques avec une ouverture d'esprit comme on en voit peu. Une chaîne de véritables passionnés de jeux vidéos avec une approche réfléchie et instructive.
Pour en finir avec Outer Wilds, je n'ai qu'un conseil : jetez-vous dessus si vous aimez les récits posés, l'exploration et les découvertes qui laissent pantois. C'est un jeu à part, pas pour toutes les manettes, mais clairement un petit bijou.
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